Le Christ affirmait Nicolas Cabasilas, n’est pas seulement la tête mais aussi le cœur de l’Église. Par l’eucharistie, il devient notre cœur. Dans ce cœur où désormais le feu habite, il faut que l’homme tout entier s’unifie, il faut que l’intelligence de la tête et la compassion des entrailles se métamorphosent dans ce creuset christique. Alors s’ouvre ce que les vieux ascètes nommaient « l’œil du cœur », « l’œil de feu », et cet œil, ce regard, décèle dans les rencontres humaines comme dans la relation entre l’homme et l’univers, d’infinies potentialités eucharistiques ; « en toutes choses, faites eucharistie », dit l’Apôtre (1 Th 5, 18), et c’est peut-être la meilleure définition de l’existence chrétienne.

Le corps eucharistique du Christ est un espace infini de lumière, un espace où la mort n’existe plus. Alors, nous n’avons plus besoin d’ennemis pour projeter sur eux notre angoisse, nous n’avons plus besoin d’esclaves pour nous imaginer que nous sommes de petits dieux. Le lointain devient prochain. L’autre existe enfin.

Olivier Clément